Partager :

bouton-facebook     bouton-twitter

BD La Horde Du Contrevent d’Eric Henninot – Tome 1 & 2

Couv_311051Après une formation impitoyable, et alors qu’ils étaient encore enfants, ils ont quitté Aberlaas, la cité des confins. Leur mission : marcher d’ouest en est jusqu’à atteindre l’Extrême-Amont, source mythique du vent qui balaye leur monde jour et nuit, sans trêve ni répit. Ils sont la 34e Horde du Contrevent. Golgoth ouvre la marche ; derrière lui, Sov, le scribe, sur les épaules duquel l’avenir de la Horde tout entière va bientôt reposer…


La Critique de l’Ogre : 10/10

Adapter La Horde Du Contrevent en bande dessinée est un beau défi. Le roman d’Alain Damasio, sorti en 2004, est une histoire complexe, polyphonique, dans un univers vaste qu’il met des centaines de pages à installer. Un huis clos centré sur une Horde, la 34ème, qui tente de remonter les terres immenses jusqu’à l’origine d’un vent continu qui souffle sur le monde. L’oeuvre originale, difficile à aborder avec sa narration à plusieurs voix et le style tout en mots de Damasio, a réussi à installer une sorte de mythologie à la fois onirique et terrifiante. Pour donner vie à cette histoire à travers les cases d’une BD, il y avait un sacré challenge… Même si, quand j’ai appris la sortie de cette adaptation, je me suis dit : mais bien sûr ! Bien sûr qu’avec le monde que Damasio avait créé, il y avait de la place à l’illustration… Comme si, juste avec les mots, il manquait encore quelque chose pour explorer à fond cet univers. Alors, pari réussi ? Oh que oui, et haut la main.

La Horde du Contrevent – Tome 1 – Première Planche

La Horde du Contrevent – Tome 1 – Première Planche

Les dessins d’Eric Henninot sont magnifiques et rendent palpable ce vent, cet ennemi omniprésent qui façonne la civilisation et le relief. Tout comme l’histoire, qui voit chaque partie rythmée par un type de vent particulier, chaque case à son vent. Doux, latéral, tourbillonnant, violent, furieux, implacable ou explosant. La force qui se dégage des dessins est impressionnante et les paysages, forgés par des siècles d’érosion, le sont tout autant. De l’art, vraiment. On peut se perdre dans les dessins, sur chaque détail, se faire embarquer dans l’aventure de forcenés de cette Horde qui contre, inlassablement, encore et encore. Pour ne rien gâcher, les personnages sont tous différents, avec de l’attention accordée à leur esthétique, que ce soit sur les coupes de cheveux, les habits (magnifiques), les tatouages, les peaux burinées par le vent perpétuel.

Les personnages, justement, sont équilibrés. Chacun à sa place, même si, contrairement au roman original qui faisait la part belle à la polyphonie, ici, on est centrée sur Sov, le scribe. Ils ont tous leur parler, leurs attitudes, leurs relations plus ou moins complexes. Golgoth, le leader tête brûlée qui ne souhaite qu’une chose, frapper le vent, foncer tête baissée, en ligne droite. Caracole, le troubadour, qui ponctue les planches de sa nonchalance et de ses jeux de mots. Erg, le chasseur équipé de sa voile qui joue avec le vent… Parfaits, ils forment une horde compacte, complexe. Franchement, je tire mon chapeau, j’ai rarement vu une BD avec autant de puissance dans les liens humains.

L’histoire est fidèle au roman de Damasio, avec quelques adaptations de scénario, même si les grandes scènes sont toujours là. Et même, à mon sens, cette histoire, on la saisit mieux que dans le livre. Si, parfois, l’écriture de Damasio peut-être difficile d’accès et lourde selon les personnages, ici, c’est léger, ça flotte, c’est fluide. L’histoire coule, toujours teintée de cet objectif final, découvrir l’origine du vent, l’extrême amont. Alors que l’enjeu est assez simple, contrer le vent jusqu’au bout, c’est l’enjeu spirituel qu’y met chacun qui importe. Un défi générationnel pour Golgoth, alors que pour d’autres, c’est plus flou. On comprend qu’ils se sont peut-être plus retrouvés ici par tradition que par volonté propre. Mais ce qui ressort, toujours, c’est ce besoin d’unité, de force collective, de surpassement, à chaque seconde. Sont-ils fous ? Démesurément courageux ? Animés par quelque chose de plus grand qu’eux ? Chacun se fera son avis.

Ces deux premiers tomes sont géniaux, l’histoire est parfaitement écrite, les dessins sont magnifiques. Une belle oeuvre et connaissant l’histoire originelle, il nous reste encore quelques grands tomes à venir.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *