Sous le regard émerveillé de leur fils, ils dansent sur «Mr. Bojangles» de Nina Simone. Leur amour est magique, vertigineux, une fête perpétuelle. Chez eux, il n’y a de place que pour le plaisir, la fantaisie et les amis.
Celle qui donne le ton, qui mène le bal, c’est la mère, feu follet imprévisible et extravagant. C’est elle qui a adopté le quatrième membre de la famille, Mademoiselle Superfétatoire, un grand oiseau exotique qui déambule dans l’appartement. C’est elle qui n’a de cesse de les entraîner dans un tourbillon de poésie et de chimères.
Un jour, pourtant, elle va trop loin. Et père et fils feront tout pour éviter l’inéluctable, pour que la fête continue, coûte que coûte.
L’amour fou n’a jamais si bien porté son nom.
La Critique de l’Ogre : 8/10
Délicieuse histoire que cette romance entre un homme somme toute équilibré et une femme possédée par une sorte de folie douce pétillante. Une rencontre entre deux êtres atypiques, émerveillés l’un par l’autre, qui tourne en une grande histoire d’amour à l’issue incertaine. Si ce livre est une preuve, s’il en est, que les extrêmes peuvent s’attirer, c’est aussi une démonstration du déséquilibre potentiel qui peut découler d’une telle histoire d’amour.
L’intérêt d’En Attendant Bojangles, au-delà de l’écriture fluide, poétique et captivante de l’auteur, est de proposer trois points de vue, trois lectures d’une seule et même histoire : celle de leur famille. C’est avant tout la vie d’un homme, tombé sous le charme d’une femme un peu folle, mais terriblement charmante. À travers cette romance, il se laisse entraîner dans la folie de sa partenaire, rentrant dans son jeu, en acceptant les contraintes… C’est ensuite l’histoire de cette femme qui, à force de côtoyer la folie, finit par y plonger entièrement, encouragée – ironiquement – par son mari. Et c’est enfin le point de vue de leur enfant, à la fois observateur, acteur, et victime de ce jeu de folie et d’amour, grandissant dans une famille sans repère.
La construction est plutôt réussie, que ce soit au travers de la narration ainsi que des événements qui basculent page après page, dans une folie de plus en plus incontrôlable, jusqu’à atteindre un point de non-retour. L’excentricité de ce couple et sa folie s’observent aussi bien avec leurs relations aux autres et leur vie familiale, que par de petites choses du quotidien : un vouvoiement permanent, un mari chasseur de mouche au harpon, leur oiseau exotique Mademoiselle Superfétatoire, une femme appelée par son mari avec un prénom différent chaque jour… Le tout baignant dans de constantes vapeurs d’alcool… Tout est fait pour que la réalité ne soit qu’un doux rêve – ou plutôt, pour eux, un cauchemar – qui n’existe qu’en dehors de leur famille.
Ce livre est fou, barré, décalé, avec une atmosphère qui swing, et aborde l’histoire d’une famille bercée dans l’irréalité d’un monde qu’ils ont eux-mêmes créé. Hélas, ce monde « idéal » n’est qu’un château en Espagne – au sens propre comme au figuré – bâti sur des fondations branlantes qui ne demandent qu’à s’écrouler… Il serait dommage de passer à côté de ce – court -roman !