Sans le vouloir, j’avais commis le crime parfait : personne ne m’avait vu venir, à part la victime. La preuve, c’est que je suis toujours en liberté. C’est dans le hall d’un aéroport que tout a commencé. Il savait que ce serait lui. La victime parfaite. Le coupable désigné d’avance. Il lui a suffi de parler. Et d’attendre que le piège se referme. C’est dans le hall d’un aéroport que tout s’est terminé. De toute façon, le hasard n’existe pas.
La Critique de l’Ogre : 9/10
Première lecture d’un livre d’Amélie Nothomb… et très bonne surprise. Un style percutant, soutenu mais décalé, des analyses pertinentes sur les relations humaines, des dialogues cyniques intégrant plusieurs niveaux de lecture… Uu cocktail détonnant au service d’une – courte – histoire sous forme d’un seul et unique dialogue enchaînant les virages à quatre-vingt-dix degrés.
Suite au retard d’un avion, un voyageur se retrouve bloqué dans le terminal d’un aéroport. Événement somme toute banal, mais qui le conduira – malheureusement pour lui – à croiser la route d’un inconnu s’étant donné la mission de le torturer… en lui parlant. Tout simplement. Point de départ à la limite du burlesque, il semble difficile de voir comment construire une histoire sur un scénario aussi abracadabrantesque. Et pourtant, on découvre que les intentions de cet inconnu sont loin d’être innocentes et l’on pressent que l’histoire est en réalité bien plus complexe qu’il n’y paraît.
C’est un livre difficile à critiquer, son intérêt résidant dans l’histoire, son enchaînement, et le but ultime vers lequel elle tend. Il serait dommage, sous prétexte de vouloir en analyser les lignes, d’en révéler ses événements clés et d’en ruiner tout le suspens. Sans en dire trop, le thème principal abordé ici se trouve être la culpabilité dans toutes ses composantes : notre façon d’y faire face, de la gérer, ou encore notre capacité à comprendre que certaines choses ne peuvent être écartés et qu’il nous faut apprendre à vivre avec, sous peine de se prendre un retour de bâton cinglant…
Le texte est, quelquefois, un peu glauque, et il faut avoir l’estomac bien accroché devant la violence qui se dégage de certaines parties à la limite du sordide. D’autant plus que le ton général qui se dégage des premières pages ne laisse aucunement présager de l’évolution de l’histoire. C’est aussi le tour de force réalisé par Amélie Nothomb : nous embarquer dans ce dialogue et nous faire dériver lentement vers le coeur de son histoire sans que l’on ne réalise comment nous en sommes arrivé là, nous prenant complètement à contre-pied.
Un très bon – court – texte, avec des dialogues décalés, fins et aux multiples lectures, qui nous emmène dans une histoire surprenante. Très efficace !