Louis est magnifiquement oisif. Sa vie est aussi calme qu’un lac sans vent. Jusqu’au jour où son père, juste avant de mourir, lui lègue un étrange objet : l’Ubiq. Un boîtier qui se porte sur l’avant-bras et qui, sur la pression d’un simple bouton, peut le transporter ailleurs, le dédoubler, le faire jouir du don d’ubiquité. D’abord craintif, intimidé, Louis se rend compte, contre toute attente, que l’appareil fonctionne.
Sauf que cet appareil, que nous rêverions tous de posséder, tombe entre les mains d’un homme qui ne sait déjà pas quoi faire de sa propre vie. Alors, en vivre deux, on imagine son embarras.
À moins que l’Ubiq ne soit l’occasion pour Louis de commencer une vie qu’il n’avait jamais osé imaginer, tout en restant un époux modèle. Qui sait alors jusqu’où l’Ubiq pourra l’entraîner !
La Critique de l’Ogre : 5/10
Patrice Leconte, cinéaste français de renom, s’essaie aussi à la littérature en qualité d’auteur de romans. Louis et l’Ubiq reprend un vieux fantasme humain, déjà largement traité, à savoir l’ubiquité : avoir la capacité de pouvoir se trouver à deux endroits au même moment. Un objet hérité de son père, et le héros se retrouve avec ce pouvoir agrémenté d’une autre faculté tout aussi intéressante : celle d’envoyer son double instantanément vers n’importe qu’elle endroit, sur Terre, où Louis est déjà allé au moins une fois. Des perspectives qui donnent l’eau à la bouche. Malheureusement, j’ai trouvé que Louis et l’Ubiq n’était pas à la hauteur de ce qu’il promettait.
NOTA : Avant de commencer et pour être clair, ce n’est pas un livre de Science-fiction. Louis est simplement un héros du quotidien, dans une vie rangée, et la découverte de l’Ubiq n’est qu’un prétexte pour mettre ce héros dans de nouvelles situations.
Je commencerai par les règles – parce que quand on s’attaque à ce genre d’histoires de téléportation et d’ubiquité, il faut en définir quelques-unes, sous peine de se retrouver avec un livre décousu – qui sont floues et qui laissent l’impression que Patrice Leconte a orienté son histoire un peu comme bon lui semblait. À commencer par la question essentielle : lorsqu’il se dédouble, que se passe-t-il pour son corps original, celui resté sur place, chez lui, avec sa femme ? Agit-il par lui-même ? Les souvenirs se mélangent-ils lorsque les deux corps se retrouvent ? On attend pendant tout le livre de découvrir ce qu’il s’est passé pour ce corps original, mais rien. On est perdu, on ne comprend pas… Tout comme les règles bizarres sur ce que rapporte, ou non, son double avec lui lorsqu’il revient dans son corps d’origine… Bref, un flou – artistique ? – qui pour moi, entache ce livre.
Il y a ensuite le message délivré, à savoir : « le bonheur est-il ailleurs ? ». En l’occurrence, pour Louis – antihéros par excellence – cet ailleurs se trouve être hors de sa vie de couple rangée avec Anna. En filigrane, ce sujet est bien traité et l’on ressent l’opposition entre la recherche du bonheur de Louis, grâce à l’Ubiq, et le fait qu’il se trompe de combat, espérant que tout lui tombera tout cuit dans la bouche. On voit à travers les pages que sa vie bien rangée qu’il n’aime plus, en quelque sorte, il en est aussi l’artisan : alors qu’il a un compte en banque vertigineusement rempli, il ne l’utilise pas, car cela fait peur à sa femme, il reste à la maison à longueur de journée à ne rien faire… L’herbe n’est pas forcément plus verte ailleurs, surtout si l’engrais est le même.
On arrive paradoxalement vers un autre problème de ce livre : le potentiel de l’Ubiq. Les possibilités de cet appareil ne sont pas du tout exploitées. Louis reste sur des éléments basiques, l’utilisant principalement pour se soustraire à une existence qui ne lui convient plus. Pas d’idées très originales sur le potentiel de cet Ubiq, on reste sur notre faim.
Reste que l’écriture est agréable, c’est une certitude. Patrice Leconte à un talent de narrateur, mais il le met au service d’une histoire bancale et qui laisse un goût d’inachevé.