Andrew Wiggin, dit Ender, n’est pas un garçon comme les autres. Depuis sa naissance, ses faits et gestes sont observés par l’intermédiaire d’un moniteur greffé dans son cerveau. Car ceux qui l’ont conçu ambitionnent de faire de lui rien de moins que le plus grand général de tous les temps, le seul capable de sauver ses semblables de l’invasion des doryphores. Et alors qu’Ender suit pas à pas le dur chemin de son apprentissage de guerrier, ses créateurs mesurent la gravité de leur choix : en donnant naissance à un monstre, n’ont-ils pas damné l’humanité elle-même?
La Critique de l’Ogre : 8/10
La première chose qui vient à l’esprit lorsque l’on termine ce roman est la multitude d’idées et de concepts qui émergent au fur et à mesure des pages – d’autant plus une fois cette œuvre replacée dans son époque, à savoir le milieu des années 80. La Stratégie Ender n’a vraiment pas pris la moindre ride et nous propose une histoire de Science-fiction dans la pure tradition du genre.
L’intrigue générale est plutôt alléchante : pour vaincre les Doryphores – espèce symbiotique sans conscience individuelle, mais agissant comme un seul et même organisme (qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler le communisme, fait peu étonnant au regard de la période où ce livre a été écrit) – et prévenir une nouvelle invasion terrestre, des enfants sont sélectionnés dès la naissance – voire avant même sa conception pour Andrew Wiggin (surnommé Ender) – pour leur faire subir un entraînement militaire et tactique dès le plus jeune âge. Le but : utiliser leur cerveau encore « vierge » de tout formatage afin de former des soldats d’un genre nouveau, utilisant des tactiques nouvelles auxquelles un adulte à l’esprit façonné par des années d’entraînement n’aurait jamais pensé. L’ultime objectif étant de débusquer les futurs chefs de la Flotte Internationale, prête à mener la bataille finale contre les Doryphores directement sur leur planète Mère.
Cette idée directrice, présente toute au long de l’histoire, est étroitement liée à l’évolution continue d’un Ender que l’on sent inéluctablement se diriger – bien souvent malgré lui – vers le rôle que ses créateurs envisageaient pour lui. Les apartés où ils commentent les actions et attitudes de leur petit protégé sont d’ailleurs très intéressantes et amènent de la tension à une histoire que l’on sent bien plus complexe qu’il n’y paraît. Le tout est servi par une écriture percutante et fluide que l’on suit avec plaisir.
Un point que j’ai particulièrement apprécié tout au long du livre est la nuance qui entoure chacun des thèmes abordés. Le premier, la guerre contre les Doryphores, qui au premier abord semble sans aucune contestation possible – les Doryphores ont essayé de nous envahir et de nous exterminer, comment ne pas vouloir couper court à toute menace ? – devient au fil de l’histoire sujet à questionnement, pour finalement aboutir à ce que le lecteur, tout comme Ender, finisse pas se demander si envoyer une flotte de vaisseaux spatiaux humains pour les exterminer chez eux est réellement justifié. Il y a aussi la formation d’Ender qui, alors qu’il se rapproche de l’objectif de ses « créateurs », finit par les effrayer et les amener à se demander s’ils n’ont pas, à travers lui, précipité la fin de l’humanité. Bref, un livre de Science-fiction qui pose de vraies questions, et qui exploite des thèmes que seul ce genre de littérature peut proposer.
Une petite critique, tout de même, liée à la jeunesse des personnages. Même en nous vendant les capacités intellectuelles particulièrement développées du jeune Andrew, il reste qu’on finit par se demander si de telles capacités sont vraiment en adéquation avec un enfant de six ans, même surdoué. D’autant plus que tout se révèle, au final, plutôt simple et facile pour lui – peut-être un peu trop – les seuls obstacles sur sa route n’étant que les relations qu’il développe avec les autres enfants du programme.
Reste que le livre regorge d’idées et d’histoires parallèles intéressantes (l’histoire du jeu vidéo, l’évolution de son frère et sa soeur restés sur Terre) et c’est un vrai plaisir.
Un très bon roman de Science-fiction aux enjeux galactiques auquel son adaptation cinématographique sortie en 2013 ne rend pas du tout honneur.